Nous connaissons tous le prêt amortissable par lequel l’emprunteur rembourse régulièrement (généralement tous les mois) jusqu’à remboursement des sommes dues au prêteur (généralement une banque).

Dans le cas du prêt in fine, l’emprunteur rembourse le capital emprunté à la fin de la durée du prêt.

Notons qu’avec le in fine, généralement les intérêts du prêt sont remboursés régulièrement (encore généralement tous les mois) de telle façon que les intérêts ne viennent pas grossir la dette et ainsi augmenter les risques de défaillance de l’emprunteur.

Exemple : acquisition d’un bien pour 200 000 €, avec un apport de 50 000 € et un emprunt sur 15 ans

  • prêt amortissable de 150 000 € à 3.5 % => mensualités de 1072.32 €
    • les mensualités sont composées d’intérêts et de capital amorti
      • au départ : beaucoup d’intérêts et peu de capital, puis progressivement le contraire
    • les 50 000 € d’apport servent directement au paiement du bien
    • coût total = 43 017.60 € (les intérêts cumulés sur 15 ans)
  • prêt in fine de 200 000 € à 3.7% => mensualités de 616.67 €
    • mensualités qui ne sont que les intérêts produits par les 200 000 € à 3.7%
      • les taux des prêts in fine sont généralement légèrement plus élevés, ici +0.2%
    • au bout de 15 ans (in fine) reste à l’emprunteur le remboursement des 200 000 € dus
    • coût total = 111 000 € (les intérêts cumulés sur 15 ans)

Jusque là, le prêt in fine paraît parfaitement défavorable !

Sauf que tous les mois l’emprunteur rembourse moins avec le in fine (616.67 €) qu’avec l’amortissable (1072.32 €). Il possède ainsi la faculté d’épargner ce qu’il n’apporte pas au remboursement de son prêt. Soit : 1072.32 € – 616.67 € = 455.65 €.

Pour être menée à bien, l’opération « crédit in fine » doit se conclure par le remboursement des 200 000 € toujours dus par l’emprunteur au bout de 15 ans. Pour cela, il dispose des 50 000 € initiaux auxquels s’ajoutent tous les mois 455.65 €.

Ces capitaux sont placés afin d’obtenir au moins 200 000 € au bout de 15 ans.

  • Plaçons-les sur une assurance vie qui ne prend pas de frais d’entrée et qui sert un rendement de 4% net de fiscalité. Au bout des 15 ans, on obtient 202 182 €. Soit un gain sur l’opération de (202 182 € – 200 000 €) = 2 182 €. Certes c’est ridicule, mais le taux de 4% est une perspective raisonnable.
  • Sur ces dernières années les rendements des bons produits monétaires ont été le plus souvent entre 5 et 6%. Par exemple avec 5.5%, au bout de 15 ans le résultat serait de 238 612 €. Soit un gain sur l’opération de (238 612 € – 200 000 €) = 38 612 €.
  • Enfin, si on s’autorise l’utilisation de produits un peu plus risqués, on peut bien sûr espérer bien plus. Mais dans ce cas, il faut prévoir plus de solidité financière en prévoyant plus d’épargne nantie ou en disposant de plus de patrimoine.

On le voit, l’opportunité d’obtenir une plus-value existe et elle peut être importante dans la conjoncture actuelle où les taux d’emprunt sont historiquement bas.

Elle devient particulièrement importante si ce prêt sert à financer l’acquisition d’un bien locatif, car les intérêts beaucoup plus importants et se maintenant durant les 15 ans par rapport au prêt amortissable seront déductibles des revenus locatifs. Et plus l’emprunteur paye d’impôts sur le revenu, plus il est dans les tranches élevées du barème (TMI), plus le prêt in fine est intéressant.

De toute manière, il serait très réducteur d’aborder une opération financière sous le seul aspect du rendement. À mon sens, il faut aussi regarder les deux autres aspects de base : disponibilité et sécurité.

  • Disponibilité :
    • là, il n’y a pas vraiment de différence. En général, l’acte de nantissement ou de délégation de créance exclut la possibilité de rachat ou d’avance à hauteur du capital emprunté. Ainsi l’emprunteur ne dispose pas de l’épargne avant de pouvoir rembourser le capital
  • Sécurité :
    • sur l’aspect financier : peu de différence. Il y a même un léger désavantage au in fine si l’emprunteur prend des risques au-delà de sa faculté à les assumer.
    • sur l’aspect patrimonial : très net avantage au in fine. En effet dans les deux cas (in fine et amortissable) le prêt est couvert par une assurance décès invalidité (ADI). Mais dans le cas du in fine, les capitaux de l’assurance vie sont attribués aux bénéficiaires désignés.

Enfin, on peut aussi s’interroger sur l’aspect fiscal, en particulier vis-à-vis de l’ISF. En effet si le contrat d’assurance vie nanti n’est pas rachetable, il ne devrait pas rentrer dans le patrimoine du contribuable.

Cependant après de nombreuses hésitations ces dernières années, la dernière position de l’administration fiscale (du 4 janvier 2010) est la suivante : Cette indisponibilité temporaire n’a pas pour effet de rendre le contrat non imposable à l’ISF. (en attendant le prochain recours)

Cet exemple illustre l’utilisation la plus courante du prêt in fine. Cependant pour les investisseurs qui le peuvent, y nantir une assurance vie dont le capital est supérieur à l’emprunt est une possibilité toute aussi intéressante qui apporte d’autres avantages comme s’affranchir de l’ADI et de l’hypothèque ou caution bancaire.

En conclusion : bien utilisé, en réponse à des objectifs précis, le prêt in fine s’avère un outil essentiel en gestion de patrimoine.